Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Avec Plume, les mailles s’amusent……et d’autres fils s’en mêlent.
2 juin 2020

"Dans l'ombre de Mary, la promesse de Walt Disney" de John Lee Hancock (2014)

Dans l'ombre de Mary

 

 

 

 

 

 

 Film de John Lee Hancock 

 2014

 2h05

 Titre original "Saving Mr Banks"

 

 

 

 

avec Tom Hanks, Emma Thompson, Paul Giamatti, Colin Farrell ...

 

Synopsis:

 Lorsque les filles de Walt Disney le supplient d’adapter au cinéma leur livre préféré, “Mary Poppins”, celui-ci leur fait une promesse... qu’il mettra vingt ans à tenir ! 

 Dans sa quête pour obtenir les droits d’adaptation du roman, Walt Disney va se heurter à l’auteure, Pamela Lyndon Travers, femme têtue et inflexible qui n’a aucunement l’intention de laisser son héroïne bien aimée se faire malmener par la machine hollywoodienne. Mais quand les ventes du livre commencent à se raréfier et que l’argent vient à manquer, elle accepte à contrecoeur de se rendre à Los Angeles pour entendre ce que Disney a imaginé... 

 Au cours de deux semaines intenses en 1961, Walt Disney va se démener pour convaincre la romancière. Armé de ses story-boards bourrés d’imagination et des chansons pleines d’entrain composées par les talentueux frères Sherman, il jette toutes ses forces dans l’offensive, mais l’ombrageuse auteure ne cède pas. Impuissant, il voit peu à peu le projet lui échapper... 

 

Mon avis:

 Je n'avais jamais entendu parler de ce film avant de le découvrir et pas dans les meilleures conditions puisque ce fût au cours d'un vol de plusieurs heures interminables pendant lesquelles, je n'arrivais pas à trouver le sommeil. Le nom de Walt Disney comme production était l'assurance d'une histoire légère, très hollywoodienne n'entraînant l'esprit dans aucun mécanisme de réflexion. De plus, j'aime particulièrement le jeu de Emma Thompson (Les vestiges du jour, Retour à Howards End, Raison et sentiments, Nanny Mc Phee ...etc). Par contre, la présence de Tom Hanks me laissait dubitative car je ne suis pas fan de cet acteur qui surjoue beaucoup trop à mon goût mais avec des éclairs de génie de sobriété comme dans Forrest Gump et La ligne verte. 

 Un mot pour décrire mon ressenti: Surprise... et une belle! Entrer dans l'univers de Disney c'est mettre le pied dans le monde multicolore des enfants où les gentils sont récompensés et les méchants punis. Cette façon binaire de penser les aventures des héros de dessins animés est la base du fonctionnement des films produits par la firme. "Dans l'ombre de Mary..." n'est pas destiné aux enfants mais aux adultes, ceux qui ont découvert Mary Poppins étant enfants.

 Tout le monde, ou presque, a vu le film aux 5 oscars de 1964 mais qui connaît le nom de Pamela Lyndon Travers (1899-1996), la créatrice de cette nurse si particulière munie de son parapluie à tête de perroquet et de son sac à malice?

 Pour rappeler le parcours de cette romancière réputée acariâtre sachez que la quiétude de son enfance australienne nourrie de contes et de poésie celtiques vole en éclats à la mort de son père banquier alcoolique qu'elle adorait. Plus tard, elle s'appropriera son prénom, Travers, comme patronyme en hommage à cet homme adulé. Alors âgée de 7 ans, elle est recueillie par sa tante avec sa mère et ses soeurs. A 20 ans, elle emménage à Londres pour poursuivre une carrière littéraire. Après avoir tout lu des poètes GW Russel et Yeats, elle découvre le bouddhisme au Japon, vit en Suisse un moment puis chez les Navajos. Cette destinée atypique lui forge un caractère bien trempé. En 1934, le premier des huit volets des aventures d'une nounou très particulière voit le jour. La légende de Mary Poppins est née! Mais ce personnage est bien plus sombre que celui imaginé par la guimauve des studios d'animation. Sa description par l'auteure est très claire:"... quelque chose qui était effrayant et en même temps très excitant".

 Pendant de longues années, Walt Disney harcèle Pamela Travers pour obtenir les droits de son récit pour le porter à l'écran. Mais l'écrivaine refuse toujours énergiquement. Walt Disney représente tout ce qu'elle déteste, la légèreté, les chansons doucereuses et par dessus tout l'animation! Elle n'a aucune envie de voir son héroïne incarnée par une ravissante idiote à la voix flûtée gambadant telle une biche écervelée au rythme de musiques frénétiques insupportables. C'est sa vie dont il est question, son enfance, sa blessure secrète!

 Enfin, en 1961 le réalisateur obtient la signature de la créatrice de Mary Poppins. Devant sa faillite programmée elle cède mais impose ses conditions ... draconiennes, refuse des acteurs, des couleurs, des musiques et surtout des animations. Elle exige l'enregistrement de toutes les séances de travail. Heureusement pour nous, car ces bandes ont servi à écrire le scénario de ce film étonnant.

 Ce biopic sur la fabrication du film oscarisé ne manquera pas de charmer les fans de la première heure. C'est aussi une chronique sur l'affrontement de deux fortes personnalités bien distinctes; une "british" vieillissante, hyper-sensible se cachant derrière une façade cassante et un géant d'Hollywood au fait de sa gloire semblant toujours voir la vie au travers de lunettes roses.

 Tom Hanks joue de façon remarquable le célèbre moustachu. Il est très crédible par son travail d'acteur épousant les mimiques, la façon de marcher et même la voix du grand Walt. On peut reprocher une vision un peu trop idéaliste du magna du cinéma d'animation, traînant derrière lui une réputation de tyran, buveur et fumeur mais qu'attendre d'autre des studios éponymes présentant le visage du fondateur ? Le duo Thompson-Hanks fonctionne à merveille, aussi efficace dans l'émotion que le conflit captivant frisant la drôlerie.

 Emma Thompson est magistrale, fascinante d'émotion derrière son masque de mégère difficile à apprivoiser. Le long métrage reste centré sur le drame de son enfance expliquant la genèse de son roman grâce à de nombreux flash-backs de son passé dans le bush australien. Sa défiance n'est pas un caprice d'auteur mais la dimension personnelle de son histoire, son drame intime la rendent très critique sur les déformations effectués par les scénaristes pour répondre aux besoins des normes "dysnériennes": amuser les enfants en chansons!

 Le film contient aussi un cocktail de merveilleux seconds rôles qui ne passent pas inaperçus. Colin Farrell est bouleversant en père déchiré entre l'amour pour sa fille et sa terrible addiction. Paul Giamatti, chauffeur attitré de Pamela Travers, est très drôle et si touchant armé d'une sincérité sans faille. Le trio infernal, pour l'auteure, le fantasque Jason Schwartzman, le cynique B.J. Novak et le négociateur Bradley Whitford permettent de découvrir l'arrière cuisine du film qui fût le premier à mélanger les animations avec les prises de vues réelles réalisant ainsi des prouesses techniques stupéfiantes pour l'époque.

 Le tout baignant dans l'atmosphère des années 60 aux USA incroyablement bien reconstituée, les costumes, les décors, le spectateur n'a aucun mal à se laisser emporter vers son enfance.

 Le point faible est, peut-être, le "happy end" made in Disney, le sentimentalisme exacerbé que combattait énergiquement l'écrivaine, alors que la réalité est beaucoup plus sombre. Pamela Travers déclarait que, malgré son succès, Mary Poppins avait échoué à capturer le sens profond de son livre en créant un film "tout en fantaisie mais sans aucune magie". D'ailleurs, traumatisée par l'industrie hollywoodienne, elle ne travailla plus jamais avec Disney qu'elle pensait plus que jamais être une entreprise de "débilitation universelle".

 Les point forts du film sont de ne pas avoir eu la tentation d'utiliser les images de 1964 et d'avoir repris des mélodies cultes en créant des variations sur les thèmes musicaux connus. Le choix des comédiens, premiers comme seconds rôles est impeccable de véracité. La lumière des années australiennes est envoûtante. Implicitement elle suggère un nouveau conflit entre l'atmosphère de douce quiétude et la violence du drame familial. 

 "Saving Mr Banks", titre original du film bien plus adapté que le français beaucoup trop long, est avant tout un mélodrame qui permet de voir le personnage de Mary Poppins sous un jour nouveau, avec une mélancolie insoupçonnée. Les situations comiques créées par l'affrontement des deux personnages principaux font preuve d'esprit et d'humour sans jamais sombrer dans le grotesque. Évidemment, l'émotion est aussi au rendez-vous.

 Si Pamela Travers pouvait visionner "Dans l'ombre de Mary...", je suis persuadée qu'elle serait très critique sur la façon dont est traité son personnage et certainement serait-elle insatisfaite de la dernière scène du film très "Disney" mais, soyons honnêtes, qui se souviendrait d'elle en France sans le film primé de son vieil "ennemi"?

 Une récente diffusion de ce long métrage sur une chaîne de la TNT m'a replongée au coeur de l'histoire. Je ne sais pas si je vous ai donné envie de découvrir l'envers du décor de ce monument de l'animation et s'il vous charmera comme je l'ai été mais je vais compléter ma culture de la célèbre Nanny par la lecture des deux premiers volumes de ses  aventures, les seuls traduits en français, pour me débarrasser des scories hollywoodiennes et avoir une vision plus complète de "l'acariâtre" et exigeante Miss Travers !

 

Publicité
Publicité
Commentaires
A
ah ben j'ai raté ce film.....mais ça donne envie de le visionner.
Répondre
Avec Plume, les mailles s’amusent……et d’autres fils s’en mêlent.
  • Les loisirs créatifs comme le tricot, le crochet, la broderie, le modelage, le bricolage, les livres et les voyages sont autant de "fils" à l'arc de mes passions à partager et échanger sans modération
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Archives
Newsletter
20 abonnés
Publicité