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Avec Plume, les mailles s’amusent……et d’autres fils s’en mêlent.
8 juin 2020

"Changer l'eau des fleurs de Valérie Perrin

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 Éditions Le Livre de Poche 

 664 pages - 2019

 

 

 

 

 

 

 

L'auteur:

valérie perrin

Née en 1967 à Gueugnon en Saône et Loire, cette bourguignonne est photographe et scénariste. Elle travaille souvent avec son mari réalisateur Claude Lelouch.

Son premier roman "Les Oubliés du Dimanche" voit le jour en 2015. Récompensé par de nombreux prix, il est édité en Italie et en Allemagne les années suivantes.

"Changer l'eau des fleurs" est son deuxième ouvrage édité en 2018 chez Albin Michel. Il a reçu le prix de la Maison de la Presse et le Prix des lecteurs.

 

4° de couverture:

Violette Toussaint est garde-cimetière dans une petite ville de Bourgogne. Les gens de passage et les habitués viennent se confier et se réchauffer dans sa loge. Avec la petite équipe de fossoyeurs et le jeune curé, elle forme une famille décalée. Mais quels évènements ont menés Violette dans cet univers où le tragique et le cocasse s'entremêlent?

Après Les Oubliés du Dimanche, un nouvel hymne au merveilleux des choses simples.

 

Mon avis:

Avertissement: Attention, pour les âmes sensibles, risque de coup de coeur!

Quand j'ai commencé à me plonger dans ce livre, prêté par une amie, au fur et à mesure des pages tournées, je ne cessais de penser: "C'est bien écrit mais je n'arrive pas à accrocher Violette, son environnement, son désamour, sa soumission...quel ennui! Ses souvenirs sans chronologie m'ennuient, son manque d'amour m'attriste mais m'ennuie, sa vie m'ennuie. Que peut-il bien y avoir de stimulant pour une gardienne de cimetière où la mort côtoie le chagrin des vivants?" Cette histoire n'est pas faite pour moi.

Mais je suis une entêtée. Je n'aime pas abandonner une lecture en cours de route même si elle ne répond pas à mes attentes. Oui, je sais, c'est idiot mais je n'y peux rien, le sentiment d'inachevé m'exaspère. Ça n'est arrivé qu'une seule et unique fois malgré mes tentatives répétées mais toujours avortées. Je me suis donc traînée pendant les cent premières pages puis, soudain, tel un éclair déchirant une nuit d'orage, j'ai su que je tenais entre mes mains une petite pépite de bonheur et que je ne la lâcherai pas avant d'avoir terminé le roman. Cinq jours à traînasser sur 100 pages et deux pour dévorer les 564 autres!

Les chapitres du roman sont surprenants. Ils se suivent mais ne racontent pas la même histoire. Chacun a une suite mais 3 à 4 paragraphes plus tard, le temps d'avoir rencontré d'autres personnages, d'écrire d'autres destins. Si cette construction m'a désarçonnée au début, rapidement j'ai pris plaisir à me demander quel serait le prochain sujet car l'écrivaine nous ouvre les portes de l'âme de Violette, sa vie, ses amours, ses déceptions, ses amitiés en déroulant le fil de ses souvenirs. Or, si les évènements d'une vie sont chronologiques, la mémoire elle, fait basculer les pensées en vrac vers la conscience, comme dans le livre.

Malgré cette histoire faite de drames et de violences affectives, évoquée dans un lieu si particulier qu'est un cimetière, il n'y aucune morbidité ni sanglots seulement de la tendresse et une immense bienveillance qui mouille le coeur. Violette est un personnage rare comme on aimerait en rencontrer au moins une fois dans sa vie. Vaillante, touchante, lucide et intelligente, elle chante au milieu de son jardin, parle à ses voisins silencieux, un peu comme son pseudo collègue de BD, Pierre Tombal de Cauvin, sans causticité mais avec un humour habillé de rose plutôt que de noir. C'est l'essence même de la tendresse qui sait taire ses blessures pour alléger le chagrin d'inconnus. Elle fait preuve d'une volonté farouche à rester debout et d'une résilience implacable face aux drames que la vie lui envoie, elle, la brindille qui semble pouvoir s'envoler au premier coup de vent. Pourtant elle n'est ni insensible, ni instruite, ni favorisée. Elle est altruiste, lumineuse et incarne la beauté des gens simples avec un coeur gros comme çà...même amoché! 

Certains peuvent "classer" ce roman dans la nouvelle catégorie à la mode, les "feel good". Oui, l'écriture de Valérie Perrin fait du bien. Ses personnages sont attachants, même Philippe Toussaint, le "salaud" grandeur nature, quand il laisse la porte de son coeur entrebâillée ... enfin! Mais coller cette étiquette ne me semble pas juste envers le travail recherché et esthétique de l'auteur qui offre une si belle tranche d'humanité, une ode à la vie et aux rencontres. Elle transforme un endroit aussi mortifère qu'un cimetière en un lieu animé où la vie chante!

Les titres de chaque chapitre sont d'ailleurs des paroles de chansons, des vers extraits de poèmes, des maximes, des pensées incitant à réfléchir sur la vie qui passe en ayant envie d'en savourer chaque seconde. Être dans l'instant, vivre ni au passé ni au futur mais au présent.....pas si facile! Exemples parmi bien d'autres que j'aime particulièrement. Ils peuvent s'offrir le luxe de devenir de belles épitaphes:
"On ne rencontre jamais les gens par hasard. Ils sont destinés à traverser notre chemin pour une raison."
"On croit que la mort est une absence quand elle est une présence secrète."
"Là d'où je suis, je souris car ma vie fut belle et surtout, j'ai aimé."

J'aurais encore tant de choses à dire sur ce texte vibrant d'amour et d'humanité mais je ne peux rien dévoiler pour vous laisser la chance de le découvrir si j'ai éveillé votre curiosité et votre envie. Ne croyez pas que ce drame est seulement triste, on a les yeux brillants de pluie mais aussi de sourire, de rire et de tendresse sans laisser de place à la désespérance. "C'est quand on vit ce que je vis qu'on sait que tout va bien, que rien n'est grave, que l'être humain a une faculté inouïe de se reconstruire, à cautériser, comme s'il avait plusieurs couches de peau les unes sur les autres. Des vies superposées. D'autres vies en magasin. Que le fond de commerce n'a pas de limite."

Refermant ce livre à regret, je me suis sentie orpheline de Violette, Nono, Julien, Léonine, Irène et Gabriel, Elvis, Sacha, Gaston et tous les autres, même Philippe. C'est un nouveau coup de coeur qui m'a charmée, enchantée et que je relirai avec plaisir, chose que je fais rarement, même si je connais déjà les surprises que réserve l'histoire.

Je me suis empressée de lire le premier ouvrage de Valérie Perrin, Les Oubliés du Dimanche, pour retrouver sa façon de conter des histoires où les destins se frôlent, se rencontrent, se caressent et où les personnages cachent de terribles secrets au fond de leur coeur sans jamais se plaindre. Évidemment cette écrivaine, à la plume insatiable du bonheur simple et communicatif, est inscrite sur ma liste "Nouveaux écrivains à suivre" sans condition. 

"Le passé est le poison du maintenant. Ressasser, c'est mourir un peu."

(Tous les passages en italique et en couleur sont les mots de Valérie Perrin.)
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Commentaires
A
Ah, je dois avouer que tu m'a de nouveau donné envie de découvrir cette lecture. Merci pour tes retours, toujours riches de détails.
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