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Avec Plume, les mailles s’amusent……et d’autres fils s’en mêlent.
13 août 2021

"Le tatoueur d'Auschwitz" de Heather Morris

Le tatoueur d'Auschwitz

 

 

 

 

 

 Éditions J'ai Lu - 2020

 319 pages

 Édition originale française : City Éditions - 2018

 Titre original : The Tattooist of Auschwitz

 Traduction de l'anglais (Australie) : Jocelyne Barsse

 

 

 

 

 

 

L'auteur :

Heather Morris

Heather Morris est une journaliste australienne, mais aussi scénariste et auteur. C'est en 1996 qu'elle décide de vivre pleinement sa passion, l'écriture.

En 2003, elle rencontre Ludwig Eisenberg (1916-2006), homme d'affaire, survivant du camp de la mort d'Auschwitz. Pendant trois ans, ce dernier lui a confié toute son histoire. C'est ainsi qu'est né le livre "Le tatoueur d'Auschwitz", devenu best-seller mondial, traduit dans de nombreuses langues et en cours d'adaptation pour l'écran.

 

4° de couverture :

L'histoire vraie d'un homme et d'une femme qui ont trouvé l'amour au cœur de l'enfer.

Sous un ciel de plomb, des prisonniers défilent à l'entrée du camp d'Auschwitz. Bientôt, ils ne seront plus que des numéros tatoués sur le bras. C'est Lale, un déporté, qui est chargé de cette sinistre tâche. Il travaille le regard rivé au sol pour éviter de voir la douleur dans les yeux de ceux qu'il marque à jamais.

Un jour, pourtant, il lève les yeux sur Gita, et la jeune femme devient la lumière dans ce monde d'une noirceur infinie. Ils savent d'emblée qu'ils sont faits l'un pour l'autre. Dans cette prison où l'on se bat pour un morceau de pain et pour sauver sa vie, il n'y a pas de place pour l'amour.

Ils doivent se contenter de minuscules moments de joie, qui leur font oublier le cauchemar du quotidien. Mais Lale fait une promesse à Gita : un jour, ils seront libres et heureux de vivre ensemble.

 

Mon avis :

Passionnée d'Histoire et ayant lu un grand nombre d'ouvrages sur le sujet, aussi bien fictions que témoignages, j'ai voulu me faire mon opinion devant l'engouement général qu'a déclenché la parution de ce livre. Honnêtement, je ne sais pas par quel bout commencer et, encore une fois, je vais aller à contre-courant du plus grand nombre.

Fidèle à mes habitudes, je n'accorde que peu d'attention, sinon aucune, aux critiques que suscite un texte, car je préfère le découvrir sans aucune influence extérieure. Pour celui-ci, il était difficile de passer entre les avis dithyrambiques s'étalant un peu partout. Ce fût d'autant plus compliqué que, par la suite, j'ai mesuré toute la polémique provoquée par ce livre. 

À ma grande surprise, malgré le sujet sensible et terriblement douloureux, je suis restée au bord du chemin, regardant des êtres brisés plongés dans un enfer inimaginable en attendant qu'ils m'embarquent dans une houle d'émotions et j'ai patienté longtemps. Très longtemps. Trop longtemps. Si longtemps que je me suis sentie gênée de n'éprouver aucun affect vis-à-vis des personnages essayant de survivre dans les camps de l'horreur. Voyant que l'étincelle d'intérêt ne viendrait pas, j'ai insisté pour terminer cette lecture, ne serait-ce que par respect pour toutes ces vies broyées, le témoignage du Tatoueur et le travail de l'auteur. Je n'ai cessé de m'interroger sur mon manque d'empathie devant une situation aussi désespérée que celle de Lale, aussi vais-je essayer de clarifier mes idées en posant les points qui ont motivé ma perplexité. L'analyse que j'expose ici, n'engage évidemment que moi et ne discrédite en rien les lecteurs qui ont apprécié ce récit. Nos différences de sensibilité sont à l'origine de toute la richesse de la Littérature pour le plaisir de chacun !

Le sujet violent et inhumain, fait partie de mes pôles d'intérêt historique, non pas pour satisfaire une quelconque pulsion morbide, mais pour espérer entrevoir une explication à l'installation d'une sauvagerie inhumaine dans un silence assourdissant. En choisissant ce livre, j'abordais une tranche d'histoire contemporaine que j'avais déjà explorée sous différents points de vue. Celui d'une "confession" d'un tatoueur de camp me paraissait intéressant à plus d'un titre. 

Je suis passée à côté de ce destin dont beaucoup d'assertions ont été remises en question par le Auschwitz Memorial Research Center. On est en droit de se poser la question : Témoignage ou roman inspiré de ? Si c'est un témoignage, les inexactitudes existantes, volontaires ou non, sont dues au récit du témoin. Si c'est un roman, les digressions inventives sont tolérables dans la limite du respect du devoir de mémoire dû aux millions de personnes exterminées par la barbarie nazie. J'avoue, le fait que le livre soit sorti sous l'étiquette "Témoignage" puis que la maison d'édition le ré-intitule "Roman", sous-entendant une position non assumée, me gêne un peu. 

Le témoin lui-même, a-t-il occulté des pans entiers de son destin, habitué à se taire comme la plupart des survivants à leur retour des Camps de la Mort ? Leurs témoignages étaient si terrifiants et incompréhensibles par la population qu'ils étaient souvent traités d'affabulateurs avant que des preuves irréfutables soient portées à la connaissance du Monde. Les négationnistes ont d'ailleurs insidieusement interprété ce mutisme pour tristement étayer leur arrogante thèse du "Mensonge". À moins que la mémoire du narrateur ait préféré occulter certaines atrocités, pendant plus de cinquante ans de silence, afin de préserver son équilibre psychique. Mécanisme d'autodéfense bien connu aujourd'hui.

Le style journalistique de l'autrice serait-il responsable de mon manque de sensibilité, gardant une distance d'observatrice et ne s'autorisant aucun débordement d'émotions ou ayant du mal à les partager ? Je ne peux croire qu'Heather Morris ait rencontré Ludwig Eisenberg, trois fois par semaine pendant trois ans, sans éprouver quelques sentiments à son sujet. Est-ce le fait que le texte ait été construit pour un scénario de film, avant de donner naissance à un livre, ce qui expliquerait sa forme moins touchante ? D'où ma sensation de platitude déconcertante du style avec des personnages restant superficiels, l'exploration de la psychologie devant s'exprimer pleinement lors de la réalisation visuelle ? Est-ce la qualité de la traduction ? Étant incapable de lire la version originale, je n'aurai pas de réponse à apporter à ce sujet.

Le dernier point qui m'a paru totalement surréaliste est l'histoire d'amour autour de laquelle est construite la deuxième partie du livre. Si elle est bien réelle puisque Lale et Gita ont réussi à survivre et à fonder une famille, son traitement littéraire muni de tous les ressorts d'une banalité à pleurer la rend peu crédible. D'accord, je ne suis pas cliente de ce thème, ce qui n'arrange pas mon ressenti vis-à-vis de ce livre. Je ne juge en aucune manière que de rares "sacrifiés", désignés par leur religion, leur couleur de peau ou leurs origines ethniques, affamés, épuisés aient réussi à voler quelques minutes de bonheur et de réconfort dans un enfer de souffrance, mais dans "Le Tatoueur ..." je n'ai pas pu adhérer une minute à cette romance convenue sans grand relief et j'enrage d'avoir de telles pensées sur un sujet aussi dramatique.

Quel dommage ! Où est l'inspiration de Valentine Goby qui, d'une histoire vraie, a su créer une ambiance effroyable dans l'excellent "Kinderzimmer" ? Toutes ces femmes qui ont accouché dans les camps et ont essayé de sauver leur bébé de la malnutrition, du froid et des maladies en laissant des cicatrices douloureuses au cœur des lecteurs ? Où est le talent de David Teboul lors de la retranscription des entretiens avec la discrète et pudique Simone Veil et ses proches, dans "L'aube à Birkenau" ? Non vraiment, je suis très déçue par ce livre qui aurait pu apporter un éclairage si complémentaire, un déporté profitant d'un statut un peu à part pour atténuer les souffrances de ses compagnons d'infortune au risque d'être taxé de traitre par les uns et de terroriste par les autres.

Je sais que suite au succès du livre, un deuxième volet est paru "Le voyage de Cilka", reprenant la destinée d'une jeune femme croisée dans le Tatoueur d'Auschwitz, mais je vais en rester là. Cilka, accusée de collaboration avec l'ennemi lors de son incarcération à Auschwitz, continue son calvaire à la libération du camp par les russes dans un goulag. Cette autre facette de l'après-guerre de l'autre côté du "Mur" doit être très intéressant et instructif, mais s'il est traité de la même façon, avec en plus, une histoire amoureuse pour reprendre la même recette, je n'arriverai pas à l'ingurgiter. Je resterai donc sur la déception d'avoir raté ce qui aurait pu être un témoignage riche en émotions sur un moment effroyablement historique.

 

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