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Avec Plume, les mailles s’amusent……et d’autres fils s’en mêlent.
4 mars 2023

"America[s]" de Ludovic Manchette et Christian Niemiec

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 Éditions Voir de près - 2022 -563 pages

 Édition originale : le cherche midi

 ISBN 9782378284664

 

 

 

 

 

 

 

 Les auteurs :

Manchette - Niemiec

 

Ludovic Manchette et Christian Niemiec sont, tous les deux, traducteurs et romanciers. Chacun de leur côté, ils ont adapté des dialogues de séries et de films, de l'anglais vers le français. Il était naturel qu'ils se rencontrent un jour, dans une société de doublage. Depuis, ils écrivent en duo. Ils ont à leur actif, des centaines d'épisodes de mangas, dont "Naruto" et "One piece", des séries comme "Band of Brothers" de Tom Hanks et Steven Spielberg, "L'enfer du Pacifique" de Steven Spielberg et "Lucifer" de Tom Kapinos et des films, dont "Dune" de Denis Villeneuve.

"Alabama 1963" est leur premier roman, écrit à quatre mains, qui a remporté plusieurs prix littéraires et a conquis un large lectorat. Il réitère leur collaboration dans un deuxième roman "America[s]".

 

 4e de couverture :

Philadelphie, juillet 1973. Voilà un an qu'Amy est sans nouvelles de sa grande sœur partie tenter sa chance à Los Angeles. Inquiète, la jeune adolescente décide de la rejoindre. Pour cela, elle doit traverser les États-Unis. Seule. Elle croisera la route d'individus singuliers : vétéran, couple en cavale, hippies de la dernière heure, un Bruce Springsteen encore débutant, mais aussi une certaine Lorraine, autrefois serveuse à Birmingham, en Alabama... Une ode à l'amitié et à la liberté.

 

 Mon avis :

 Ayant succombé au charme du tandem Manchette/Niemiec avec "Alabama 1963", je ne pouvais pas louper leur second roman à quatre mains. La version classique étant victime de son succès et ayant du mal à regagner son étagère de médiathèque, c'est par le truchement d'une édition spéciale conçue pour des personnes en difficulté visuelle que j'ai repris, avec plaisir, le chemin des USA pour une aventure totalement différente. Et quelle aventure ! Après l'Amérique des années 60, en pleine remise en question sur la ségrégation raciale, voici les hippies hirsutes, leur rock'n roll endiablé dans un nuage de Marie-Jeanne. Inutile de lever les yeux au ciel, j'exagère beaucoup, car le "Peace and Love" estampillé années 70, n'était pas pour tout le monde. Résumer "America[s]" à cette image stéréotypée ne lui rendrait pas service.

 Le roman raconte un road-trip sur la route 66, The Mother Road mythique de tous les motards de la planète, mais aussi de nombre de "caisseux" nostalgiques. Le livre n'est cependant pas un dépliant touristique, vantant les mérites, ou les défauts, de telle ou telle bourgade. Il offre une importante palette de caractères humains, plus ou moins recommandables, dans l'atmosphère des Seventies américaines.

 Bonnie, la fille aînée d'une famille dysfonctionnelle, a fui vers Los Angeles, à la poursuite de son rêve, n'en pouvant plus de la violence alcoolisée de ses parents. Amy, jeune adolescence de 13 ans, mal-aimée par les siens et traumatisée par la disparition de sa meilleure amie qu'elle a vu mourir sous ses yeux, décide, elle aussi, de tout quitter pour se lancer sur les traces de sa sœur. Comment peut-on, si jeune, envisager de parcourir presque 4 500 km en solitaire, sans un sou en poche, si ce n'est pour trouver la chaleur qui lui manque cruellement chez elle ?

 Assez souvent, je déplore qu'un récit ne soit qu'une accumulation d'invraisemblances et une élucubration littéraire peu crédible. America[s] pourrait entrer dans cette catégorie, tant les événements s'emboîtent à la perfection, parsemés d'une kyrielle de personnages réels ayant fait les beaux jours des années 70. Au point que, à la manière d'un feel-good, la déception se profilait à l'horizon. Seulement, c'était sans compter sur un élément clé, l'innocence et la détermination d'une petite fille solitaire et malheureuse que l'on a envie de protéger. En happant le lecteur par son intelligence et sa débrouillardise, elle l'embarque dans ses bagages à la rencontre de l'Amérique profonde ou superficielle, d'où le [S] du titre.

 Visiblement, les auteurs aiment les USA et partagent cet attachement avec leur lectorat. Ils truffent leur récit d'extraits de chansons et de références musicales comme cinématographiques qui ont, facilement, ouvert ma boîte à souvenirs, avec des tranches de vie affluant à la manière du ressac de l'océan. Led Zeppelin, Elton John, David Bowie, Cher, Hugh Hefner, Ryan O'Neal, Love Story, et bien sûr, un Bruce Springsteen, à l'orée de sa gloire, font partie intégrante du destin d'Amy. De même qu'une certaine Lorraine, ancienne serveuse... à Birmingham... en Alabama. Clin d'œil sympathique adressé à tous les lecteurs qui ont apprécié "Alabama 1963" !

 Dans son road-trip, l'ado courageuse va découvrir toutes les facettes de l'Amérique, s'enrichir à chaque rencontre, même les plus néfastes, et apprendre la vie. Au-delà de la nostalgie que peut engendrer ce récit chez les lecteurs qui ont vécu cette période de liberté incroyable et de créativité musicale intense, assombrie par la désillusion des vétérans du Vietnam, l'amitié et l'humanité sont les principaux moteurs vibrants de cette épopée. 

 On peut voir dans ce roman, un monde des Bisounours irréel et idéaliste, peuplé de gens sympathiques et compatissants. Et pourquoi pas ? Moi, je me suis laissé happer par l'incroyable lucidité d'Amy dotée d'une logique implacable, aidée par des plumes très agréables à lire et à suivre. J'ai apprécié l'humour sous-jacent du récit qui l'imprègne de légèreté en offrant une parenthèse d'air frais et pur dans notre monde pour le moins sinistre. Ce livre peut être ressenti comme un conte initiatique et sociétal, préférant basculer du côté lumineux de la vie et laissant sur son passage un sentiment agréable de sérénité et d'accomplissement. En partant à la recherche de sa sœur, Amy a fini par se trouver elle-même en s'entourant de personnes qui l'aiment réellement, illustration terrible que dans des cas extrêmes, il est préférable de se choisir une famille en s'entourant des bonnes personnes plutôt que de subir la sienne.

 

 Extraits et citations :

* « Il faut surtout pas suivre les chemins tout tracés. C'est le meilleur moyen d'aller nulle part ! »

* « Va là où tu es aimée. »

* « Ne dis jamais aux autres ce qui te complexe, parce qu'ils finiront par te donner raison ! »

* « Ouais, la vie est une suite de... (Il réfléchit)... de deuils. Toutes sortes de deuils : de notre innocence, d'endroits qu'on doit quitter, de certains rêves, certains espoirs. Parce qu'il faut pas seulement renoncer à ce qu'on a perdu, il faut aussi apprendre à renoncer à ce qu'on n'aura jamais... »

* « C'est drôle, on envoie des satellites là-haut pour pouvoir mieux communiquer, mais j'ai l'impression que plus la science fait des progrès dans ce domaine, moins on communique. Et plus on est seuls. »

* « La vie est trop courte pour vivre le rêve de quelqu'un d'autre ! »

* « Les adultes, ils croient que parce qu'on est petits, on a des petits chagrins. Moi, je crois que c'est tout le contraire. Tout est plus grand quand on est petit... »

* « Il parait qu’il y a deux sortes de gens qui prennent la route : ceux qui fuient quelque chose et ceux qui vont quelque part. »

* « [...]  toute notre vie, on est confrontés au deuil. À…toutes sortes de deuils. De gens qu’on perd, d’autres qu’on perd juste de vue. »

* « Quand on te donne quelque chose, tu prends. Toujours. Même si t’en veux pas. C’est pour toutes les fois où on te donne pas quelque chose que t’aurais voulu ! »

* « La vie nous fait des cadeaux qu’elle nous reprend, me dit Bruce. C’est pour ça qu’il faut profiter de ce qu’on a tant qu’on l’a. »

* « Ce qui compte, continue Clarence, c’est ce que tu fais des épreuves que tu rencontres sur ta route. »

 

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Commentaires
D
Bonsoir, j'avais aussi bien apprécié Alabama 1963. J'ai noté celui-ci mais ce n'est pas une priorité. Bonne soirée.
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