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Avec Plume, les mailles s’amusent……et d’autres fils s’en mêlent.
26 octobre 2022

"Mon père, ma mère, mes tremblements de terre" de Julien Dufresne-Lamy

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 Éditions Belfond - 2020 

 251 pages

 ISBN : 9782714493118

 

 

 

 

 

 L'auteur :

Julien Dufresne-Lamy Julien Dufresne-Lamy est né en 1987 a été journaliste culturel avant d'être écrivain. À 22 ans, il propose une nouvelle lors d'un concours. Depuis son entrée en "écriture", il publie des romans de littérature générale, souvent engagés pour adultes (proxénétisme, drags queens, transgenre, etc.). Il est aussi auteur pour la jeunesse. Chacune de ses parutions suscite l'intérêt du public, de la critique et des blogueurs littéraires.

 

 

 4e de couverture :

"Est-ce que sur la table de chirurgie, mon père ressent le chaud, le froid ? Allez savoir. Dans la salle d’attente, ma mère porte sa chemise saharienne et le soleil blanc tape doucement sur les fenêtres. L’air est doux. Un air qui n’a rien à voir avec la mort, les drames. Ici, ce n’est pas un drame. C’est autre chose qui se passe."


Dans cette salle, Charlie, quinze ans, patiente avec sa mère. Bientôt, son père sortira du bloc. Elle s’appellera Alice.
Durant ce temps suspendu, Charlie se souvient des deux dernières années d'une vie de famille terrassée. Deux années de métamorphose, d’émoi et de rejet, de grands doutes et de petites euphories. Deux années sismiques que Charlie cherche à comprendre à jamais. Tandis que les longues minutes s’écoulent, nerveuses, avant l’arrivée d’Alice, Charlie raconte la transition de son père. Sans rien cacher de ce parcours plus monumental qu’un voyage dans l’espace, depuis le jour de Pâques où son père s’est révélée. Où pour Charlie, la terre s’est mise à trembler.


Julien Dufresne-Lamy signe un cinquième roman doux et audacieux, profondément juste, sur la transidentité et la famille. La bouleversante histoire d’amour d’un clan uni qui, ensemble, apprend le courage d’être soi.

 

 Mon avis :

 Quand j'ai ouvert ce livre pour me plonger dans une nouvelle histoire, je ne m'attendais pas à ce que j'allais découvrir. Il est très rare que je ne lise pas la quatrième de couverture, et là, ce fût le cas. Je maintiens encore une fois qu'il n'y a pas de hasard, car je ne suis pas certaine d'avoir eu envie d'aborder un sujet si difficile et délicat sans connaître l'auteur. Je peux affirmer maintenant que ça aurait été un grand rendez-vous manqué.

 Le sujet est de suivre la métamorphose d'un père de famille par les yeux de son fils Charles, un jeune adolescent de 13 ans. Plus précisément, Julien Dufresne-Lamy crée un huis-clos familial, parfois étouffant, parfois drôle, mais toujours déroutant. Comme le précise l'auteur dans les remerciements, "il s'agit d'une histoire familiale et, surtout, une histoire d'amour" servie par une plume majestueuse, subtile et pudique.

 L'écrivain détaille le parcours difficile et progressif de l'abandon du costume d'Aurélien au profit de la féminité d'Alice. Essuyant hostilités et rejet, le soutien des proches n'est pas toujours sans faille. Le tremblement de terre dévastateur qu'entraîne ce changement identitaire, ébranle les fondations de la famille sans jamais les effondrer. Chacun des personnages est bouleversant de sincérité. Aurélien/Alice, dans son lent cheminement vers une renaissance désirée, veille à ne jamais lâcher la main de ses proches. La mère, qui malgré quelques soubresauts compréhensibles, ne cesse d'accompagner son mari dans sa transformation, de l'encourager dans ses efforts et de veiller sur son fils. Charles traverse des phases de déni et raconte au lecteur comment il arrive à survivre au cataclysme familial en tenant un journal la nuit, laissant libre cours à ses ressentis, souvent aussi confus que limpides.

 À chaque étape de l'acheminement de cette famille vers l'inéluctable, le moteur commun frappant est l'Amour. L'amour indiscutable, soutien inébranlable pour chacun des membres frappés, de diverses façons, par ce changement de vie. Pas facile pour une femme, toujours amoureuse de son mari, de se retrouver à témoigner son amour à une autre femme. Pas plus pour un jeune adolescent, si complice de son papa, de reprendre cette entente avec un père, car il reste toujours son géniteur, d'un nouveau genre.

 Avec ce sujet aussi difficile qu'ambitieux, j'ai ajouté un nouvel auteur à ma liste d'écrivains à suivre pour la qualité de son écriture nimbée de délicatesse, de tolérance, de sensibilité sans jamais frôler l'impudique ni le scabreux, saupoudrée de la juste mesure d'humour. Cette histoire d'amour inconditionnel, d'une rare intensité émotionnelle, ne peut que laisser des traces. Une fiction de qualité qui permet d'approcher le tsunami que vivent ces personnes nées dans le mauvais corps, ainsi que leur entourage, s'il résiste aux pressions de la société.

 

 Extraits et citations :

* "Avant, je pensais que sous les meubles, on ne cachait que les armes du crime. Les affaires sales. Les bouteilles d'alcool ou les boîtes de capotes. Maintenant, c'est différent. J'ai compris qu'on pouvait même y cacher une vie."

* "J'ai treize ans, la terre se désagrège et avec cette vue plongeante sur le vide, j'entrevois le plus grand de nos vertiges."

* "À chaque nouveau passage à l'acte, Papa prenait son temps. Maman appelait ça ses babys steps, et en moi un nœud épais se serrait à jamais."

* "Je crois que je n'ai pas toujours aimé mon père. Je crois que non. Je crois qu'à cette époque, mon amour devenait invisible et molécule. À la place, c'est la colère qui me calcinait."

* "Sur la nappe, je grattais silencieusement la peau dure de mes coudes et c'était comme des flammes qui me léchaient le ventre. Mon père bavassait et je m'en foutais. J'avais le droit d'avoir des humeurs et d'être ingrat, c'est mon âge qui le disait. Sauf que non. Mon père me volait ma crise d'adolescence sans trembler."

* "Les mentalités, c'est comme la régénérescence. Ça débarque à l'étroit et ça finit par s'assouplir."

* "Comme si grandir, en fin de compte, n'était qu'une suite d'images qui vivent et nous traversent, qui s'élèvent en nous avant de succomber, vaincues dans nos têtes."

* "Il faut accepter de ne pas comprendre les choses mais comprendre qu'elles existent."

* "- Pour changer, tout n'est pas une question de souffrance et de pitié. Tout n'est pas une question de vie et de mort.

    - Alors c'est une question de quoi ?

    - Juste une question d'amour."

* "Il y a deux sortes de gens affreux dans la vie. Les gens qui ont un avis sur tout. Et les gens qui tendent la main à tous sauf à ceux qui en ont besoin."

 

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